Rive droite

La rive droite de la Lana est la partie la plus résidentielle du centre-ville que vous aborderez à partir de la place Skanderbeg. C’est la principale place de la ville, autour de laquelle se trouvent les plus importants lieux de visite comme la mosquée Et’hem Bey, le musée national d’Histoire et Bunk’Art 2. Elle porte le nom du héros national Gjergj Kastrioti Skanderbeg dont la statue trône sur le rond-point central. Couvrant une surface de 40 000 m², cette place semi-piétonne a été conçue par les Autrichiens durant la Première Guerre mondiale, mais doit sa forme actuelle à Florestano Di Fausto (1890-1965), grand architecte italien qui œuvra dans les colonies du régime fasciste de Mussolini dans les années 1930. À partir de 1939, celui-ci fit édifier toute une série de vastes bâtiments néo-Renaissance qui abritent aujourd’hui certains ministères et l’hôtel de ville. Plus tard, le pouvoir communiste fit détruire l’ancien bazar ottoman et la cathédrale orthodoxe pour aménager de nouveaux édifices comme le palais de la Culture. Constamment en travaux depuis les années 2000, elle demeure un important symbole du pouvoir, chaque nouveau maire y apportant sa touche personnelle. La place Skanderbeg accueille aussi de nombreuses festivités avec notamment un grand marché de Noël.

Autour de la statue équestre de Skanderbeg se trouvent, dans le sens des aiguilles d’une montre : l’hôtel Tirana International, le Théâtre national d’opéra et ballet (TKOB), le palais de la Culture, la mosquée Et'Hem Bey avec derrière la tour de l’Horloge, l’hôtel de ville, le ministère des Travaux publics, des Transports et des Communications, le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Consommation (avec derrière la cathédrale orthodoxe), le ministère du Commerce et de l’Énergie (avec derrière le Théâtre des marionnettes), un jardin de fleurs (avec derrière la monumentale Banque nationale), un espace vert et le musée national d’Histoire.

De la place Skanderbeg, Tirana présente l’image d’une ville moderne et bien structurée. Mais cet aspect s’estompe très vite, au fur et à mesure que l’on s’éloigne de ses quartiers administratifs et d’affaires. C’est alors une tout autre cité qui se dévoile, surpeuplée et à l’urbanisation anarchique. Les larges boulevards laissent la place à des rues étroites et boueuses par temps de pluie, les grandes tours modernes et colorées à des immeubles qui ont mal vieilli. Les grands hôtels et les quartiers résidentiels cohabitent ainsi avec des zones grises à l’habitat vétuste.

La rue Myslym-Shyri, portant le nom d’un partisan de 26 ans tué lors de la libération de Tirana, en juillet 1944, s’étend à l’ouest du parc Rinia, parallèlement à la Lana. C’est l’une des rues les plus vivantes de la capitale. On y trouve aussi bien des cafés et restaurants nichés dans les cours de vieux bâtiments classiques des années 1930, des immeubles communistes d’habitation que des buildings modernes. Bordée d’arbres et de larges trottoirs, on y vient faire son shopping dans les nombreuses boutiques de prêt-à-porter et de téléphonie, prendre un taxi ou faire son marché.

Enfin, la place Avni-Rustemi honore la mémoire de celui qui assassina le dictateur albanais Essad Pacha Toptani, le 13 juin 1920 à Paris. À l’est de la place Skanderbeg, en longeant la mosquée Et'Hem Bey et la rue Luigj Gurakuqi, cette place abrite à la fois le siège de la Banque nationale et l’entrée du quartier de Pazari i Ri (« Nouveau Marché »). C’est la partie de la ville qui a le mieux conservé l’ambiance ottomane d’antan avec ses entrelacs de ruelles, ses petits commerçants, ses beaux étals multicolores, là où il faut acheter du bon raki, du fromage ou des fruits. Incontournable si l’on veut vraiment sentir l’âme de la ville !

Blloku

Interdit à la grande majorité de la population de 1961 à 1991, le quartier de Blloku accueillait les dignitaires du Parti communiste, qui y vivaient franchement mieux qu’ailleurs. Dans son roman Le Paumé (éditions Payot & Rivages Poche, 1999), le célèbre auteur albanais Fatos Kongoli en donne une description fidèle. « C’est vrai : j’avais du mal à respirer en songeant que, d’ici peu, j’allais pouvoir franchir une frontière jusque-là inimaginable, écrit-il. À mes yeux, elle marquait la limite d’un autre monde… »

Sur la rive gauche de la Lana, l’ancien carré des dirigeants communistes, interdit au peuple entre 1961 et 1991 et surveillé à l’époque par la garde de la République, est devenu un espace public très à la mode. Blloku est délimité par le boulevard des Martyrs de la Nation (Dëshmët e Kombit) à l’est et la rue Sami Frashëri à l’ouest, la rivière Lana au nord et la rue Abdyl Frashëri au sud. Ses rues ombragées, bordées de belles villas, de blocs plutôt plus jolis qu’ailleurs et d’innombrables bars, forment le cœur de la vie nocturne de la capitale. Également quartier des affaires, en témoignent les tours de bureaux qui y poussent, le Bloc abrite de nombreuses organisations internationales. Son influence s’étend désormais du côté est du boulevard des Martyrs de la Nation, où tours (de bureaux et résidences huppées), restaurants tendance et cafés recherchés se multiplient. Avec ses fast-foods et restaurants internationaux, ses bars bruyants, ses boîtes de nuit bondées et ses petits espaces verts proprets, c’est aujourd’hui un des lieux préférés des habitants de Tirana.

Le Bloc, ou plutôt l’ex-Bloc (Ish-Blloku) comme on l’appelle désormais, fut pendant trente ans réservé à l’élite politique du pays, complètement fermé aux habitants du reste de la ville et surveillé par la garde républicaine. En 1991, quand le Bloc fut enfin ouvert, les habitants s’y ruèrent pour découvrir ce sanctuaire des apparatchiks et en particulier la maison d’Enver Hoxha, appelée Villa 31, à l’angle des rues Ismail Qemali et Ibrahim Rugova (ex-rue Dëshmorët e 4 Shkurtit), servant aujourd’hui de résidence pour les hôtes des délégations étrangères. S’attendant à trouver un luxe infini, ils furent un peu déçus en découvrant cette habitation moderne aux lignes très simples, construite en béton, dotée d’un petit jardin et de quelques colonnes en pierre, ne comprenant que deux ailes de deux et trois étages. On est en effet bien loin de la grandeur affichée par certains palais d’autres dictateurs communistes européens.