Détail d'une colonne de l'église Sainte-Marie, site d'Apollonia d'Illyrie © Teresa Otto- Shutterstock.com.jpg
Monastère Saint-Nicolas-de-Mésopotam © salajean - Shutterstock.com .jpg
Mosquée Et'Hem Bey à Tirana © Zabotnova Inna - Shutterstock.com.jpg
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Forteresses

L’Albanie est d’abord un pays de forteresses. Elle conserve les vestiges de 158 d’entre elles réparties sur tout le territoire. Pour la plupart transformées par les Ottomans entre le XVe et le XIXe siècle, elles ont toutes des origines plus anciennes : points défensifs du néolithique, acropoles grecques, bourgs fortifiés illyriens, citadelles byzantines ou forts vénitiens.

Les incontournables. La plus agréable forteresse à parcourir est celle de Berat avec ses remparts, ses églises et ruelles pavées, son musée Onufri et ses maisons en pierre encore habitées pour certaines. Aujourd’hui paisible, elle vit pourtant les rêves de conquête du fils du roi de France s’y fracasser en 1281. La plus impressionnante est celle de Gjirokastra : un « château d’argent » (Agyro Kastro en grec) qui donne son nom à la ville qu’elle domine. Ce mastodonte de pierre traversé d’immenses souterrains était si inquiétant que personne n’en entreprit jamais le siège. Et pour les plus belles vues ? Celle de Rozafa, à Shkodra. Dernière place vénitienne d’Albanie à tomber aux mains des Ottomans en 1479, elle offre un vaste panorama sur l’Adriatique et les Alpes albanaises.

Forteresses de Skanderbeg… Si l’on se fie aux récits locaux, chaque colline albanaise, ou presque, a été un jour une place forte du héros national. C’est un peu exagéré, mais il y en a beaucoup. Près de Tirana, citons celle de Kruja, fief de la famille Kastriot, où Skanderbeg naquit en 1405. Il y a aussi celle de Petrela, au sud de la capitale : un petit éperon rocheux où résidait Mamica Kastrioti, la sœur du chef des insurgés. Et puis celle de Lezha, sur la côte nord, où Skanderbeg fonda la ligue qui donna tant de fil à retordre aux Ottomans et où il finit par mourir, emporté par la malaria en 1468.

… et d’Ali Pacha. Entre les années 1760 et 1820, le redoutable gouverneur semi-indépendant de l’Épire conquit bien des forteresses. Le souci, c’est que la coutume locale lui attribue souvent la création de ces mêmes forteresses, comme celle de Porto Palermo, sur la mer Ionienne. En fait, elle fut construite par les Vénitiens dans une superbe baie qui évoquait pour eux celle de Palerme, en Sicile. Quant au « fort d’Ali Pacha », stratégiquement situé entre Corfou et Butrint, c’est encore une construction vénitienne. Mais rendons à Ali Pacha ce qui appartient à Ali Pacha : celui-ci fut autant un destructeur de villes qu’un grand bâtisseur de ponts et de fortins à travers le sud de l’Albanie et le nord de la Grèce. Il fut le seul à s’emparer de la forteresse de Berat, sans arme, uniquement par la ruse (et avec un peu de poison).

Vestiges illyriens. Quelques petites forteresses antiques ont été délaissées par les Ottomans, comme celle d’Amantia, dans l’arrière-pays de Vlora. Fondée par les Grecs, puis occupée par la tribu illyrienne hellénisée des Amantes, elle possède de belles ruines, un stade notamment, et offre des vues splendides sur la vallée de la Vjosa. Plus loin dans les montagnes, près de Ballsh, se dresse Byllis, ancienne capitale de la tribu semi-hellénisée des Bylliones avec un théâtre, l’arche très photogénique d’une porte fortifiée et les fondations de basiliques byzantines.

Bunkers

L’Albanie, c’est aussi le pays des bunkers. Ils sont partout : au centre des villes, sur les plages, nichés sur des collines paumées… On les retrouve aussi en miniature, sous forme de souvenir dans les boutiques pour touristes, ou dans le film Kolonel Bunker (1996) de Kujtim Çashku.

Paranoïa. Entre les années 1960 et 1980, le régime communiste a englouti des fortunes pour construire au moins 750 000 bunkers, c’est-à-dire 26 par kilomètre carré ou un pour quatre Albanais de l’époque. Plusieurs dizaines de milliers ont été depuis détruits à l’explosif et à la pioche pour extraire le métal du béton armé, rapportant en moyenne 300 € par bunker aux habitants. Mais plus de la moitié a survécu, servant parfois de caves, de granges ou pour des rendez-vous entre amoureux à l’abri des regards. Ils sont le témoignage le plus marquant de la paranoïa du dictateur Enver Hoxha. Après ses ruptures successives avec la Yougoslavie (1948), l’URSS (1960) et la Chine (à partir de 1972), le premier secrétaire du Parti du travail d'Albanie redoutait une invasion par ses anciens alliés ou par les forces de l’Otan.

« Bunkerisation des esprits ». Chacun des 800 000 citoyens mobilisables devait pouvoir rejoindre sa casemate en quelques minutes pour tenir sa position dans le cadre d’une doctrine de guérilla totale, en milieu urbain, à la campagne, dans les montagnes et sur les plages d’un débarquement qui n’est jamais venu. C’est ainsi que la plupart des bunkers que l’on peut voir aujourd’hui étaient conçus pour une personne seulement. D’autres modèles plus imposants servaient de poste de commandement ou de position d’artillerie. Cet omniprésence des abris défensifs et l’endoctrinement de la population a laissé des traces, et pas que dans le paysage. Né en 1951, l’écrivain et ancien dissident Fatos Lubonja appelle cela la « bunkerisation des esprits » : une vision fantasmagorique de tout ce qui vient de l’étranger associée à une crainte de tout ce qui vient de l’État. Ce mal albanais façonne encore les mentalités.

Ville souterraine. Dans le cadre de la bunkerisation du pays, le régime albanais fit aussi creuser dans chaque grande ville des abris capables d’accueillir la nomenklatura locale. On peut visiter ces immenses couloirs de béton armé au Bunk’Art 1 de Tirana ou au musée de la Guerre froide, dans les entrailles de Gjirokastra. Mais l’exemple le plus délirant de cet enfouissement paranoïaque se trouve à Kukës. Sous cette ville gardant la frontière avec le Kosovo (ancienne province yougoslave) se trouve… une autre ville. Un labyrinthe de 11 km de longueur desservait des salles pour abriter des soldats, mais aussi toute la population de la ville avec des dortoirs, des cuisines, des écoles, une boulangerie, etc. Il est désormais possible d’en visiter une partie avec un guide local.

Villes

Elles sont dans l’ensemble assez laides car durant la période communiste, il s’agissait de construire beaucoup, vite et pas cher. Et puis aussi parce que la population urbaine a explosé depuis la chute du régime. Sans cadastre ni plan d’urbanisme, le résultat est souvent chaotique. Heureusement, quelques superbes centres historiques ont échappé au bétonnage.

Gjirokastra et Berat. La « ville penchée » et la « ville aux mille fenêtres » sont inscrites conjointement au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2005. Elles sont magnifiques, mais chacune à leur manière. Construit à flanc de colline, sous la plus impressionnante forteresse du pays, le centre historique de Gjirokastra est tout de pierre grise, des pavés des ruelles aux lauzes des toitures en passant par les kulla, ces hautes maisons fortifiées érigées entre le XVIIe et le XIXe siècle pour l’élite musulmane. S’il a été si bien préservé, c’est par la volonté du dictateur Enver Hoxha qui naquit ici en 1908. Le plus étonnant, c’est qu’on peut visiter Gjirokastra sans même s’y déplacer. Car c’est aussi la ville natale d’Ismaïl Kadaré, copieusement décrite dans Le Général de l’armée morte (1966), Chronique de la ville de pierre (1971), Climat de folie (2005), La Poupée (2015)… L’écrivain raconte aussi Berat, où il vécut deux ans, dans une nouvelle au titre improbable : Histoire de l'Union des écrivains albanais telle que reflétée dans le miroir d'une femme (2001). Mais rien à voir avec « Gjirokastra la grise ». Certes, le centre historique de Berat conserve lui aussi une forteresse byzantine et des maisons ottomanes agglutinées à flanc de colline. Seulement ici, les bâtisses sont blanches, étincelantes sous le soleil. Collées les unes aux autres, elles forment un magnifique ensemble avec le grand quartier de Mangalem et, en face, sur l’autre rive de l’Osum, l’ancien petit quartier orthodoxe de Gorica, à l’architecture semblable mais au relief moins abrupt. Alors, c’est vrai que ce surnom de « ville aux mille fenêtres » est bien trouvé. Il est pourtant né d’une confusion récente. Les Albanais surnommaient autrefois Berat një mbi një, littéralement « un sur un », en référence à ses maisons construites les unes sur les autres. Par proximité des sonorités, cela est devenu një mijë, « un millier ».

Autres pépites. Korça est l'une des villes les plus agréable du pays. Elle conserve l’unique charchia (centre commercial et religieux ottoman) d’Albanie, mais aussi une petite touche française héritée de la brève occupation par l’armée d’Orient (1916-1920) : larges trottoirs, villas néoclassiques et ruelles pavées. Elle est d’ailleurs surnommée « le petit Paris ». Ensuite, c’est moins évident. Toutefois, pile entre la mer Adriatique et la mer Ionienne, la grande ville portuaire de Vlora possède un minuscule centre historique de style néoclassique et ottoman autour de la belle rue Justin-Godart. Il y a aussi Shkodra, la « capitale » du nord de l’Albanie. Bien que ravagée par 3 tremblements de terre (1905, 1978 et 1979), elle cache bien son jeu avec de splendides villas ottomanes (comme celle qui abrite le musée d’Histoire) et de jolies maisons basses du XIXe siècle dans la rue piétonne Kolë-Idromeno. Quand à Durrës, la deuxième ville la plus peuplée du pays, elle est décevante malgré sa riche histoire : le plus grand amphithéâtre romain des Balkans a été ravagé par des constructions illégales, l’agora byzantine est perdue au milieu du béton et la vénérable tour vénitienne semble aujourd’hui minuscule face aux bâtiments modernes.

Le « cas Tirana ». Sympa, la capitale albanaise ? Les avis sont partagés. C’est une ville récente, fondée par les Ottomans en 1614, qui a connu un développement fulgurant depuis un siècle : 10 000 habitants en 1923, contre plus de 550 000 aujourd’hui. Si bien que son Grand parc de 290 ha, prévu pour 150 000 habitants en 1955, paraît aujourd’hui bien dérisoire. Quant aux traces du passé, elles sont extrêmement rares : la mosquée Et'hem Bey est l’unique vestige de la grande charchia ottomane. Cette dernière fut rasée pour laisser place à la plus grande esplanade du pays : la place Skanderbeg. Imaginée par les Austro-Hongrois au cours de la Première Guerre mondiale, elle fut finalement dessinée par les Italiens dans les années 1920. Ce sont en effet les architectes et urbanistes de Mussolini qui ont tracé le plan actuel du centre-ville. De la place Skanderbeg au Grand parc, le long du boulevard des Martyrs-de-la-Nation (les « Champs-Élysées albanais »), se succèdent des bâtiments néoclassiques aux façades colorées ou typiquement fascistes au lignes pures qui hébergent aujourd’hui les institutions politiques. La dictature communiste est venue ensuite ajouter sa touche : un petit parc et un hôtel pour espionner les invités étrangers par-ci, un palais des congrès brutaliste par-là. Sans oublier, sur la place Skanderbeg, le musée national d’Histoire et le palais de la Culture, tous deux d’architecture stalinienne, et, sur la rive gauche de la Lana, le quartier de Blloku, autrefois réservé à la nomenklatura, et la « Pyramide » prévue pour servir de mausolée à Enver Hoxha. Cet ensemble « stalino-fasciste », jusque-là plutôt cohérent, est aujourd’hui perturbé par une multitude de hautes tours modernes. Mais ces buildings rutilants sont la marque du nouveau pouvoir albanais : la mafia. Plusieurs organisations, dont Moneyval, le comité d’experts anticorruption du Conseil de l’Europe, estiment en effet que ces constructions sont le moyen pour les puissantes organisations criminelles albanaises de blanchir leur argent sale. Ces immeubles, dont certains dépasseront bientôt les 200 m de hauteur (comme la Bofill Tower), viennent non seulement faire tache dans le paysage, mais elles ont aussi un impact sur la vie des habitants. Depuis 2018, les « tours de la mafia » déjà construites ont fait grimper les loyers du centre-ville au-dessus des 500 € par mois… soit autant que le salaire moyen à Tirana. Résultat : les habitants fuient et les petits commerces ferment.

Patrimoine historique

Si les autorités actuelles font quelques efforts pour préserver les sites majeurs, le patrimoine architectural historique est en danger face aux promoteurs immobiliers et au désintérêt de la population.

Butrint : l’exception. Inscrit en 1992 au patrimoine mondial de l’Unesco, le site archéologique de Butrint est exceptionnellement beau avec un parc national tout autour, des ruines grecques, romaines, byzantines et vénitiennes qui s’entremêlent à la nature. Il est aussi exceptionnellement bien préservé : cette zone frontalière était interdite d’accès durant la dictature communiste et elle fait l’objet d’un respect scrupuleux des règles de construction depuis. Hélas, on ne peut pas en dire autant des autres sites archéologiques du pays. La plupart ne sont même pas ouverts au public. Quand on peut y accéder, on est souvent déçu par la mauvaise mise en valeur des vestiges. Quant au deuxième plus grand et plus prestigieux site du pays, celui d’Apollonie d’Illyrie, près de Fier, il a été ravagé par l’installation de 400 bunkers dans les années 1970.

Églises byzantines. Dans la moitié sud du pays, des centaines d’églises orthodoxes constituent ce qui devrait être l’une des principales attractions culturelles de l’Albanie. Construites entre le VIe et le XIVe siècle par les empereurs, princes, archevêques et riches familles locales de l’Empire byzantin, elles étaient autrefois magnifiques avec leurs plans en croix inscrite, leurs murs aux élégants assemblages de brique et de pierre, leurs clochers montés sur tambour, leurs iconostases finement sculptée et leurs fresques colorées. Hélas, elles sont pour la plupart mal conservées, voire abandonnées, et ont été abondamment pillées. Certes, contrairement à beaucoup d’autres lieux de culte en Albanie, elles ont échappé à la frénésie destructrice de la campagne athéiste lancée par les communistes en 1967 car le régime d’Enver Hoxha avait perçu la portée historique de ces églises. Mais en fermant celles-ci, en interdisant la religion et en chassant les popes, la dictature a détourné la population orthodoxe de ces mêmes églises. Depuis le retour à la démocratie, en 1992, l’État albanais n’a pas eu les moyens financiers de les restaurer. Il n’en a pas eu non plus la volonté. Car les chrétiens orthodoxes sont perçus avec méfiance par les autorités : ils sont trop proches des Grecs, appartiennent souvent à la minorité grecque et toute une partie du clergé orthodoxe actuel vient ou a été formée en Grèce, avec qui l’Albanie entretient des rapports compliqués. Parmi les rares églises préservées, on conseille la visite de celles de Mborja, près de Korça, et de Labova, près de Gjirokastra, de celles de l’île de Maligrad, sur le lac Prespa, et de Mesopotam, près de Saranda, sans oublier l’unique monastère orthodoxe albanais en activité, celui d’Ardenica, près de Fier, où Skanderbeg se maria en 1451.

Églises post-byzantines. D’une valeur moindre, ces églises orthodoxes construites après la conquête ottomane témoignent toutefois du renouveau artistique albanais lancé par le peintre Onufri au XVIe siècle. Lui-même et ses disciples ont laissé de superbes réalisations au sein de la forteresse de Berat, à l’église de Shelcan, près d’Elbasan, et jusqu’en Grèce, à Kastoria. L’école picturale de Korça prit ensuite le relais à partir du XVIIe siècle, accompagnée par toute une génération de bâtisseurs grecs, aroumains, bulgares et albanais. Le chef-d’œuvre de ces artistes et artisans fut Moscopole, ville de commerçants aroumains et grecs proche de Korça qui était la plus riche d’Albanie au XVIIIe siècle. Hélas, elle fut ravagée par Ali Pacha, puis par des bandits, si bien que seules quatre des anciennes églises de Moscopole (aujourd’hui simple village) subsistent avec certaines des fresques des maîtres Selenica et Zografi.

Mosquées. Force est de constater que les mosquées ottomanes d’Albanie présentent peu d’interêt architectural. Par ailleurs, la plus grande partie des mosquées albanaises des XVe-XIXe siècles ont été rasées lors de la campagne athéiste lancée en 1967. Le plus souvent, dans chaque grande ville, un seul lieu de culte sunnite fut considéré comme digne d’interêt et épargné : la mosquée Et’hem Bey de Tirana avec ses fresques, la mosquée de Plomb, d’inspiration arabe, à Shkodra, la mosquée Mirahori de Korça, la mosquée Muradiye de Vlora, la mosquée du Bazar, à Gjirokastra… Berat fait figure d’exception avec les ruines de la plus ancienne mosquée du pays, dans la forteresse, et trois autres mosquées dans le quartier de Mangalem, dont celles dite « des Célibataires », qui fait partie des très rares mosquées à fresques des Balkans. Par ailleurs, au nom de la modernité, l’immense majorité des bâtiments civils ottomans (bains, marchés, caravansérails…) ont eux aussi disparu au cours du XXe siècle.

Églises catholiques. Là encore, le mouvement athéiste de 1967 a fait des ravages. La destruction sélective opérée par le régime communiste a été encore plus drastique que pour les mosquées. D’abord pour mettre fin à l’influence étrangère du Vatican et des franciscains. Ensuite parce bien peu d’édifices catholiques albanais présentaient une véritable valeur. Les plus anciens, pour la plupart situés dans la moitié nord du pays, avaient déjà été convertis en mosquées par les Ottomans. Les plus récents, du XIXe siècle, étaient de piètre facture. Parmi les rares monuments épargnés, citons la cathédrale Saint-Étienne de Shkodra, décorée par Kolë Idromeno en 1909, et l’ossature de l’église Saint-Nicolas (XIVe siècle), au sein du mausolée de Skanderbeg, à Lezha. La petite église Saint-Jean de Theth est quant à elle superbe avec sa toiture en tavaillons et les Alpes albanaises en arrière-plan. Reconstruite en 2006, elle symbolise l’esprit de résistance des communautés catholiques réfugiées dans les hautes vallées du Nord pour échapper à l’influence ottomane des villes.

Tekkés. Si les bektashis occupèrent longtemps une place centrale dans l’organisation politique, militaire et religieuse de l’Empire ottoman, ils furent ensuite combattus avec ardeur par les sultans et les imams à partir du XIXe siècle. Ainsi, la plupart des vieux tekkés (lieux de culte soufis appartenant pour la plupart aux bektashis) albanais ont disparu. Mais sous la protection d’Ali Pacha, la confrérie bektashi a fait de l’Albanie son bastion, au point d’y installer son siège, au petit tekké de Turan, près de Korça, en 1812. L’étonnant siège mondial du bektashisme, entièrement rebâti en 2011, se trouve aujourd’hui à Tirana. Kruja, près de la capitale, abrite deux importants sites, dont le tekké Sari-Saltik superbement placé au sommet d’une falaise. Toutefois, la plupart des tekkés du XIXe siècle, épargnés par les communistes ou reconstruits après la chute de la dictature, sont situés dans la partie sud. Mais hormis le tekké de Melan, qui profite d’un beau cadre naturel dans la région de Gjirokastra, peu d’entre eux présentent une réelle valeur architecturale ou artistique.