Musée de Lusaka © Boris Mayer - Shutterstock.com.jpg

Peintures rupestres de Mwela

A cinq kilomètres de Kasama, le site de Mwela Rock Paintings occupe une zone naturelle. Un millier d’exemples d’art rupestre constituent l’une des collections d’art ancien la plus vaste et la plus significative du continent. Datées de l’Age de Pierre, les plus anciennes peintures sont l’œuvre de chasseurs-cueilleurs (entre 6 000 et 10 000 ans avant notre ère). Certaines réalisations se composent de motifs abstraits, tandis que d’autres montrent des figures humaines et zoomorphes. Un grand sens du mouvement caractérise la plupart des scènes naturalistes.

Art africain traditionnel

Dans l'art africain, le masque intervient pour répondre à des rôles multiples. Que sa fonction soit mystique, sociale ou politique, son style obéit à des codes propres à chaque ethnie. Fabriqué en matériaux naturels, il est d’inspiration naturaliste. La chevelure peut être faite de boules d’osier. Le masque, comme la statuaire zambienne, s’enrichit de variantes stylistiques issues des rencontres entre les populations. Les réalisations zambiennes sont pour l’essentiel d’une qualité exceptionnelle. Les détails et l’équilibre des traits sont façonnés avec minutie.
Le masque dicte un comportement. Sculpté dans le bois, il est porté à des moments importants : pour célébrer un événement, rendre la justice, accompagner la puberté, la naissance ou la mort, notamment.
En Zambie, les traditions bantoues concernent plusieurs ethnies. Chez les Chokwe, les Luvale, Lunda, Luchasi et Mbunda, les masques sont les « makishi ». Le sculpteur désigne le masque comme « la tête », portée par « le corps ». Le porteur, qui danse pour incarner l’esprit ancestral, n’est qu’un intermédiaire. C’est pourquoi il n’est en aucun cas responsable de ses agissements.  Les Chokwé ont des masques féminins, le Mwana Pwo, et masculins, le Cihongo. Ils sont complétés par des costumes spécifiques.  Le masque likisho représente la virilité, donc la force, l’abondance et la fertilité.
Les maques Luvale sont dotés d’un front haut, d’arcades sourcilières prononcées et d’un long nez fin. Les joues sont marquées par des scarifications.  Dans les sociétés guerrières, le masque se fait menaçant comme dans la tribu Salampasu. Un modèle au visage émacié, paré de dents pointues, d’un nez bulbeux et de gros yeux caverneux est destiné aux rites initiatiques. Certains sont tellement craints qu’ils font fuir les femmes et les enfants.  
La statuaire obéit aux mêmes codes naturalistes. Les proportions mettent l’accent sur l’essentiel comme le montrent les statues de maternité Chokwe. Une femme paisible, à la poitrine en saillie, allaite son bébé.

Débuts de la peinture

Jusqu’à une époque récente, les artistes en herbe ne disposaient pas d’écoles pour se former. Les rares lieux d’exposition sont des galeries tenues par les artistes eux-mêmes.
Dans ce contexte, Stephen Kappata, né en 1936 durant l’occupation britannique, se montre dès l’enfance curieux de tout et doué pour le dessin. Il faut attendre les années 1980 pour que l’opportunité d’exposer à l’étranger se présente à lui. Son style naïf et coloré séduit par ses touches humoristiques.
Son travail tourne autour de trois thèmes : la culture zambienne, l’occupation, et les scènes du quotidien. Les symboles de la colonisation, dépeints avec un regard satirique, parsèment ses tableaux. Il se fait le porte-parole d’un peuple qui aspire à reprendre le contrôle de son territoire. Son trait simple et accessible à tous, ainsi que sa palette colorée participent à la popularité de cet artiste majeur.
Peintre et sculpteur autodidacte, Enock Ilunga s’inspire de la vie de tous les jours. Né en 1954, il ajoute une note abstraite à ses toiles. Ses sculptures sont quant à elles construites en métal. C’est en Suède et en Norvège que ses tableaux rencontrent le succès. Pour autant, Enock Illunga déplore que les artistes zambiens manquent de structures pour faire carrière. De fait, les musées nationaux comme le Lusaka Museum ou le Musée de Livingstone sont difficilement accessibles pour le visiteur, et ne réservent que peu de place à la création contemporaine.

De nos jours

La scène culturelle émergente est soutenue par quelques fondations. START propose des expositions et des résidences dans le quartier de Kabulonga. Ces dernières décennies, des ateliers ou écoles d’art se sont ouverts, la sculpture continuant d’occuper une place de choix. La statuaire en bois conserve les faveurs du public. Deux sculpteurs dominent l'école zambienne : Friday Tembo et Flinto Chandia. Très talentueux, ces deux artistes, internationalement reconnus, ont développé des styles très affirmés et très appréciés du grand public.
Né à Lusaka et mort prématurément, Friday Tembo était un sculpteur autodidacte. Il a cependant perfectionné sa technique en participant à des résidences, notamment à Londres, au Gasworks Studios. Il a reçu le prisé Ngoma Award, décerné tous les ans par le National Arts Council of Zambia à un artiste national. En 2019, le prix a été attribué à N’gandwe Mwaba, né en 1982 à Kitwe, ainsi sélectionné pour une exposition officielle en Israël. Ses figures longilignes se situent à mi-chemin de l’art tribal et de l’abstraction. En Zambie, il a ensuite exposé à la 37D Gallery ainsi qu’à la Galerie Henry Tayali à Lusaka et au Musée de Livingstone.
L’artiste Mulenga Jestina Mulenga, née en 1987, est peintre, écrivaine, sculptrice et photographe. Les installations et les performances complètent sa démarche. Elle s’investit en parallèle dans la gestion culturelle. Membre actif de l’Insaka International Artists Trust, elle intervient à l’atelier de Lusaka AAWW – Art Academy Without Walls. Ses peintures se caractérisent par des coups de couteau qui tranchent la matière, et par ses couleurs primaires. Elle questionne la représentation du corps de la femme noire à travers l’histoire, dans une Zambie post-coloniale. Invitée à exposer dans toute l’Afrique, elle participe à des résidences en Europe.

Lieux de la création contemporaine

Le marché de l’art zambien est en pleine mutation. Les talents sont encouragés par des initiatives de plus en plus nombreuses. Les projets collaboratifs sont particulièrement appréciés par les artistes.
A venir, le Lusaka Contemporary Art Center (LuCAC) sera réservé à la création zambienne dès son ouverture prévue en 2023. Cette fondation privée inclura une galerie, une bibliothèque et une résidence d’artistes. Son objectif principal est d’encourager l’émergence de nouveaux talents, dans le respect de toutes les disciplines et origines.
La 37D Gallery poursuit ses actions en faveur des arts plastiques. Artistes reconnus et talents de demain assurent le dynamisme du programme de cette institution.
De nos jours, l’art public est répandu en Zambie comme dans la plupart des pays d’Afrique. A Lusaka cependant, il n’a que récemment trouvé sa place sur les murs.
Si vous passez par Lusaka dans les semaines qui précèdent les fêtes de fin d’année, prévoyez une escale au ZADS - Zambian Art & Design Show. Idéal pour des emplettes arty ! Durant quelques jours, l’événement s’installe habituellement à East Park Mall. L’entrée est gratuite. La petite centaine d’exposants regroupe des artistes et des artisans locaux : œuvres d’art, objets de décoration et bijoux uniques. Rien que de la qualité et de l’originalité !

Street-art

L’essor de l’art urbain à Lusaka découle de l’influence des modes occidentales. Le graffiti, autrefois associé au vandalisme et à la violence, a su se faire aimer. A cela s’ajoute le fait que le matériel artistique soit devenu plus abordable, et que les commandes privées se multiplient. De nos jours, les entreprises sont nombreuses à faire appel à des graffeurs pour embellir leurs murs et leurs locaux. On peut le constater en traversant Oxfam le long de Zambezi road. Les fresquistes sont également conviés à participer à la revalorisation des quartiers. Dans ce but, The National Heritage Conservation Commission et le National Arts Council ont récemment passé commande aux artistes de rue.
L’une des premières fresques peintes dans la capitale orne une façade de Mutaba House, qui abrite la Barclays Bank à l’angle de Katondo street et de Cairo road.  
Restons sur Cairo Road, côté nord, pour admirer le Toyota Mural qui signale les bureaux du siège de Toyota Zambie. Outre plusieurs modèles de voitures arborant le nom de son modèle, des robots, des fleurs, des hommes et des femmes dans des instants du quotidien, ainsi que des animaux sauvages sont peints dans une explosion de couleurs vives. L’immense fresque semble s’animer quand on passe devant en voiture. Réalisée en avril 2018, l’œuvre est née d’une collaboration entre London Kamwendo et Dwain Whitaker. Ce sont les noms à retenir, dès les premiers pas de l’art public dans la capitale zambienne.  
Dwain Whitaker, né au Zimbabwe, a grandi en Zambie. Durant son enfance, il découvre le street-art en regardant un documentaire. Le déclic se produit. En 2009, il s’installe à Lusaka et fait la connaissance de son binôme London Kamwendo. Ce dernier arrive à l’art urbain par le dessin. Une rencontre avec un graffeur sud-africain le décide à développer ce mode d’expression. Pour le duo, l’art du graffiti est destiné à être vu par le plus grand nombre et à remplir les vides laissés dans l’espace public.
L’eau est célébrée tous les ans, le 22 mars, à l’occasion du World Water Day. Le directeur de Zambia Breweries a marqué le coup en proposant à des street-artistes de peindre les citernes de l’usine de Mungwi Road. Sur l’une d’elles, on peut lire le slogan « Water is Life » parmi des éléphants, un aigle… et un robinet. De l’aveu de tous, le résultat est impressionnant. Les artistes, de leur côté, se réjouissent de cette opportunité. Zambia Breweries a par ce biais réussi à alerter la population sur la nécessité de préserver l’eau. Le moyen de communication immédiat et attrayant que représente l’art rappelle au quotidien que nos ressources naturelles sont précieuses.