Vie familiale

Reconnue par la constitution du pays ainsi que par le code de la famille comme la « cellule mère de la nation », la vie familiale est marquée par trois moments particuliers : la naissance, le mariage et la mort. Élargie aux différents degrés de parenté, la famille est considérée à la fois comme unité de production et d’intégration sociale. La forte solidarité qui se manifeste entre les membres de la famille élargie a pour objectif de bannir l’individualisme conduisant à l’exclusion sociale. Mais une rupture s’est opérée au sein de la cellule familiale élargie, avec les changements socio-économiques issus de la période coloniale, puis postcoloniale et aujourd’hui de l’urbanisation du pays. Cette rupture se matérialise par un déclin progressif des solidarités traditionnelles, de l’individualisation conduisant parfois à la marginalité dont les formes les plus graves sont la délinquance, la prostitution, l’abandon des enfants ou des personnes âgées. La famille congolaise est aujourd’hui confrontée à un dualisme culturel, entre le souci de conserver son identité et la nécessité de s’intégrer dans un monde en pleine mutation influencé par la culture occidentale.

Régimes de parenté

Deux régimes de parenté coexistent en RDC. L’influence de l’ère coloniale a fait que la plupart des communautés congolaises sont devenues patrilinéaires. Dans ce système de parenté, la descendance se transmet par les hommes. Ainsi, les enfants d’une femme ne font pas partie de sa parenté mais de celle de son mari. Dans le système matrilinéaire, ou matriarcat, la parenté passe par la femme : le statut social et l’héritage se transmettent non pas d’une femme à ses filles mais des frères de la femme aux frères de ses filles. C’est le frère de la mère, l’oncle maternel, qui exerce l’autorité. Actuellement, une tendance à la filiation bilatérale faisant coexister les deux parentés se confirme dans certaines communautés, notamment chez les Lunda.

Lignage et clan

La forte solidarité qui caractérise traditionnellement la société congolaise dépend d’une structure solide sous-tendue tout d’abord par l’ethnie, au sein de laquelle les individus partagent en commun un héritage culturel et linguistique. Mais aussi, en second plan, par le lignage formé par une grande famille dont la parenté remonte à plusieurs générations. Le lignage est le regroupement de tous ceux qui ont conscience de la relation de consanguinité qui les unit à partir d’un ancêtre commun. Celui-ci est doté d’une hiérarchie interne, les aînés ayant la charge des cadets qui leur doivent respect et considération. Chaque individu a un rôle et une place bien déterminés au sein de la collectivité, qui lui est transmis par son âge, sa sagesse, son appartenance familiale, son origine sociale, son appartenance ethnique, sa caste, etc.

La structure de fraternité consanguine prend forme dans le clan. C’est le socle regroupant des identités diverses ayant conscience d’appartenir à une même souche, même si la plupart du temps elles sont dispersées suivant des fortunes diverses. Le clan est néanmoins doté d’une identité par laquelle il ne peut souffrir de confusion. Les noms de clans sont des mots anciens, chargés d’histoire et qui désignent des noms soit d’ancêtres, soit de lieux mythiques.

Deuil

Au Congo, le rituel des funérailles est très précis et empreint de tradition, bien qu’on constate qu’il évolue en s’adaptant à des contingences d’ordre pratique, surtout en ville. A Kinshasa et dans certaines provinces, le décès est en effet souvent devenu un moment de réjouissance. Le défunt est lavé et son corps exposé dans un lieu public, la résidence du défunt étant bien souvent trop exiguë pour accueillir la multitude de personnes, connaissances et anonymes, venues assister aux cérémonies, et accessoirement se remplir l’estomac. À l’occasion du deuil, les familles dépensent ainsi des fortunes pour honorer le mort et manifester publiquement la tristesse qui accompagne ce moment. C’est aussi l’occasion pour les membres de la famille et les amis de rivaliser d’élégance par leur tenue. En raison de contraintes budgétaires, toutes ces cérémonies ont néanmoins aujourd’hui été réduites, bien que le deuil continue encore en famille pendant plusieurs jours.

L’inhumation est suivie de concertations familiales pour examiner la situation nouvelle et résoudre les litiges qui s’y rapportent (cause du décès, partage de l’héritage, prise en charge des enfants et éventuellement de la veuve par l’un des beaux-frères...). La mort, surtout quand il s’agit d’un proche, a en principe une cause qui doit être décelée. Ce qui donne lieu à de nombreux abus constatés actuellement, en rapport avec l’essor des églises de réveil et autres sectes religieuses, qui désignent en général un responsable. Cela peut être l’ancêtre mécontent, le mauvais œil ou la présence d’un « enfant sorcier » dans la famille, qui doit alors être chassé ou exorcisé.

Coutumes maritales

La constitution congolaise consacre le droit de chaque citoyen de se marier avec la personne de son choix, de sexe opposé, en vue de fonder une famille. Si dans la société traditionnelle, la formation de couples et le mariage sont encore liés à certaines coutumes (mariages dans la fratrie, tolérance de la polygamie, union avec des partenaires obligés), celles-ci ont pratiquement disparu au sein des populations urbaines. Les mœurs locales en matière de fidélité sont néanmoins bien plus souples, particulièrement vis-à-vis de la gente masculine. Beaucoup d’hommes entretiennent ainsi plusieurs femmes, maîtresses ou épouses, appelées pudiquement deuxième, troisième ou quatrième « bureau ».

Dot et mariage coutumier. Une autre tradition toujours bien vivace est relative à l’échange de la dot entre les deux familles des futurs époux. La famille du mari se doit en effet de négocier le montant de la dot avec la famille (souvent les oncles) de la future mariée, afin de déterminer sa valeur symbolique. Ce qui est surtout une manière déguisée de faire honneur à celle-ci et aux membres de sa famille, et de témoigner qu’elle sera bien accueillie dans sa belle-famille. La dot comprend essentiellement des biens matériels, selon une liste communiquée par les représentants de la mariée et fixée en fonction des revenus de la belle-famille, qui vont de casiers de bière à des chèvres ou des pagnes en passant par le costume du père de la mariée. C’est un processus très important partout au Congo. L’échange des biens se concrétise lors du mariage coutumier (sorte de fiançailles), préalable à toute autre démarche et cérémonie officielles célébrant l’union (mariages religieux et civil).

Place de la femme

Ces dernières années, on observe que la femme congolaise urbaine issue de la classe moyenne s’est affranchie d’une série d’obstacles à son épanouissement, principalement d’ordre sexiste et en lien avec la tradition. La Congolaise, et singulièrement la Kinoise, est aujourd’hui dépouillée de tout complexe, de l’université au bureau en passant par les affaires ou la politique. Du moins pour celle qui a le niveau de scolarisation adéquat, et le réseau lui permettant d’emprunter l’ascenseur social. Car pour la plupart des Congolaises, les impératifs de survie économique restent un frein à la pratique d’autres activités en dehors des métiers typiquement féminins de coiffure, couture, cuisine (les « 3 C »), ou de vente au marché et au détail. Elles y restent souvent cloisonnées, faute d’autres débouchés ou d’instruction conséquente, et par nécessité de faire (littéralement) bouillir la marmite. Ce sont les femmes qui ramènent en effet le plus souvent les revenus du ménage.

Droits fondamentaux des femmes. Les droits fondamentaux des femmes sont depuis plusieurs années pris en compte à un haut niveau de l’État, avec la création d’un « ministère du Genre, Famille et Enfant ». La femme congolaise a à présent officiellement droit à l’alphabétisation et pouvant librement, et à l’âge voulu, choisir son partenaire ou le quitter sans perdre ses droits. La constitution de la troisième République consacre par ailleurs la parité entre les hommes et les femmes, tout en renforçant son rôle d’épouse et de mère, même si le frein le plus important à l’épanouissement des femmes au Congo reste justement l’absence ou le manque de moyens visant au contrôle des naissances et à la gestion de la sexualité. Des campagnes dénoncent depuis quelque temps une certaine dépravation des mœurs à l’œuvre, et qui touchent notamment les jeunes Kinoises, pour les inciter à refuser des avances ou relations sexuelles en échange de cadeaux, argent ou flatteries, de la part le plus souvent d’hommes mariés plus âgés, dont elles deviennent ainsi dépendantes financièrement.

Violences sexuelles. A l’est de la RDC, comme ailleurs dans le monde, le viol est une arme de guerre commis par divers groupes armés sévissant dans ces régions, afin de déstabiliser et détruire la structure traditionnelle familiale congolaise, puisque les femmes ayant subi un viol deviennent ainsi sources de honte pour leur famille, et sont souvent rejetées… Ce faisant, il est possible de prendre possession de territoires et de procéder au pillage, sans entraves, des riches ressources souvent présentes, à des fins géopolitiques. Le Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la Paix 2018 pour son travail de réparation en faveur des femmes violées et mutilées, n’a de cesse de dénoncer ces pratiques et desseins stratégiques dont sont victimes les femmes congolaises depuis plusieurs décennies. On constate que ces pratiques de viol généralisées entraînent par ailleurs des changements de comportement vis-à-vis de la femme et de la sexualité au sein de la société congolaise, celle-ci se retrouvant complètement chamboulée et en perte de repères face à ce phénomène qui reste trop souvent impuni. Et ce, malgré la pénalisation récente du viol en tant que crime dans la loi congolaise.

Homosexualité

Au Congo, comme ailleurs en Afrique, l’homosexualité n’est pas particulièrement tolérée ni bien accueillie au sein de sociétés encore relativement traditionnelles et fortement influencées par la religion qui condamne cette orientation sexuelle considérée comme déviante et immorale. Kinshasa et les grandes villes sont à peine plus progressistes à cet égard, par rapport aux zones rurales... Que l’on soit un couple, hétéro ou gay, congolais ou étranger, les marques d’affection et gestes amoureux se doivent d’être relativement discrets (pas d’embrassade passionnée en rue ou dans des lieux publics).  Même si en boîte ou dans les bars-terrasses prévoyant des « espaces réservés », c’est autre chose... Par ailleurs, on voit souvent en ville deux hommes ou deux femmes se tenir la main, ce qui ne signifie nullement qu’ils sont en couple, c’est simplement une marque d’affection assez courante ici entre amis ou membres de la même famille.