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Abbaye Saint-Roman © emily_m_wilson - stock.adobe.com.jpg

Grandeurs et monuments : les marques de Rome

L’architecture romaine façonne le sud du département, elle est unique en son genre, dans sa propension à s'imposer, à vouloir dire la puissance de son Empire, mais également par la qualité de ses constructions qui leur permettent de perdurer. Avec ses 49 mètres de hauteur, le Pont du Gard est le seul aqueduc antique de trois étages encore debout. Même à l'époque de son édification, 50 av J.-C, son envergure était colossale, pour répondre à l’expansion de Nîmes, qu'il alimenta d'eau pendant 5 siècles. Fontaines et thermes se sont conséquemment multipliés dans la cité. Les arènes de Nîmes font aussi partie des édifices romains les mieux préservés d'Europe. D'une symétrie parfaite, elles pouvaient accueillir jusqu'à 24 000 spectateurs. Les magnifiques colonnes ornées de feuilles d'acanthe et les marches de la Maison Carrée, dédiée au culte impérial, sont bien spécifiques à ce style architectural. Le temple de Diane et la Tour Magne ont été bâtis sur des constructions beaucoup plus anciennes, instaurées par les Volques, mais sont devenus des éléments phares de la période romaine. Les Jardins de la Fontaine, créés au XVIIIe siècle, ont été conçus afin de les mettre en valeur. L'Antiquité a continué d'être citée dans l'architecture de la région, du Moyen-Âge à aujourd'hui. Fragments de bas-reliefs dans les façades, frises sculptées dans les encadrements de porte sont autant de clin d’œil à cette période.

Immigration monastique, pèlerinages et croisades : le Moyen Âge

Dès le début du Moyen-Âge, divers ordres monastiques s'installent dans le Gard, forts de leur popularité, leur structure permettant un espace d'instruction prisé. Ils viennent de Montpellier, du Gévaudan et même d'Espagne. Les abbayes deviennent des lieux d'effervescence et de pouvoir. Magnifique monument troglodyte habité par des ermites depuis le Ve siècle, l’abbaye de Saint-Roman à Beaucaire est devenue bénédictine au VIIe et accueillera un studium, collège pour adolescents de toutes classes sociales. Ce sont les foules de pèlerins qui se dirigeaient à l'abbatiale de Saint-Gilles qui firent émerger la ville du même nom, qui compta jusqu'à 30 000 habitants. Les pèlerins venaient de toute l'Europe et la plupart empruntaient la voie de Régordane, le tronçon cévenol qui reliait l'Île-de-France au Bas Languedoc. Le château de Portes, situé sur ce chemin, a certainement joué un rôle sur ce lieu de passage et son expansion en a bénéficié. De petits ordres monastiques se déplacent ensuite vers le nord du département, dans les Cévennes, les prieurés bénédictins et cisterciens devenant les bases de nombreux villages. Des mas sont fondés, la terre est défrichée, les murs de soutènement et les faïsses se construisent. En 1240, Saint-Louis souhaitant un accès direct à la Méditerranée pour ses Croisades, négocie Aigues-Mortes à l’abbaye de la ville et y construit la tour Carbonnière et la Tour Constance. Les remparts seront initiés par son fils et terminés 30 ans plus tard. L'enceinte, les voûtes d'ogives majestueuses des tours et son donjon constituent des joyaux de l'architecture gothique pour un ouvrage militaire.

Entre sobriété et domination : guerres de religion et Renaissance

Dès le XVIe siècle, la Réforme se répand en France et les Protestants vont transformer les bâtiments catholiques pour les investir conformément à leur conception spirituelle, soit par la suppression du culte des images et des statues de saints, et la réorganisation de l'espace intérieur des églises, faisant disparaître l'autel et recentrant l'édifice autour de la chair. Les premiers temples construits s'inspirent de théâtres, en plan circulaire ou ovale, car il s'agit avant tout d'un lieu de réunion plutôt que d'un sanctuaire, où la parole et l'écoute prédominent. Le Gard bouillonne et prospère, Uzès est la cinquième ville protestante en France, bien que la ville soit aussi forte de son évêché, et en 1632, le Duc d'Uzès est fait premier duc de France, afin d'asseoir sa loyauté à la couronne. Sur la façade du Duché, les trois ordres classiques d'architecture, ionique, dorique et corinthiens se superposent. Beaucaire, bien connue comme ville relais de la voie Domitienne puis comme capitale française des marchandises grâce à la Foire de la Madeleine, s'amplifie dans le faste et le raffinement architectural, à l'égal de la richesse de ses marchands. Dans les deux villes, on peut encore aujourd'hui admirer le charme des façades et des hôtels particuliers des XVIe et XVIIe siècles, très bien conservés. Les guerres de religion et leurs diverses violences en forme de guérilla entraîneront la destruction de plusieurs édifices catholiques puis protestants à partir de 1685, à la révocation de l'Édit de Nantes. L'architecture catholique reprend peu à peu le dessus sur le territoire, jusqu'à la Révolution, qui viendra à nouveau tout bousculer.

De la soie au charbon : les industries qui façonnent les lieux

Avec l'abondance des cours d'eau qui coulent dans le Gard, les anciens moulins se trouvent en grand nombre. Vers le nord du département, l'habitat rural est caractéristique des Cévennes schisteuses, les villages reculés, comme Anduze, Mialet ou Aujac, amalgamant les vieilles maisons rustiques étroites et hautes, en pierre taillée. Sous leurs toits de lauzes, elles sont construites sans fondation, directement posées sur la roche. Les mas avec leur bergerie tout près de la résidence principale sont nombreux. Les clèdes, petites maisonnettes qui servaient à faire sécher les châtaignes, sont plus éloignées, dispersées dans les montagnes. Adjacentes aux maisons, on trouve aussi les magnaneries, où se cultivaient les vers à soie. Tout en pierres et en grosses poutres de châtaignier, ces espaces essentiels à la sériculture gardent un charme pittoresque. Les grandes filatures abandonnées se situent dans les villages, près des rivières, et demeurent impressionnantes. Plusieurs d'entre elles ont été réaffectées à un nouvel usage, souvent culturel, comme à Val d'Aigoual ou à Lasalle, ou encore muséal, comme la Maison Rouge à Saint-Jean-du-Gard. Autour d'Alès et de La Grand Combe, on remarque encore les maisons de mineurs, beaucoup plus modernes. D'anciens entrepôts sont aussi occupés désormais par des initiatives associatives ou culturelles, tout en gardant les marques du fort passé ouvrier du territoire.