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Origines et densité de population

Scientifiques et historiens cherchent toujours l'origine exacte des Croates. La théorie sur des ascendances slave ou perse est communément admise. Plus sûre est l'origine du mot. Les Romains craignaient les tribus autochtones qui les attaquaient avec des cris effrayants : « Huraa ! Huraa ! U rat ! » Traduisez : « En guerre ! », ce qui a donné par la suite Hurati, transcrit Hrvatski pour « Croate ». Les Latins, qui n’utilisaient pas le son h dans leur langue, les baptisèrent avec le mot Kroati, d’où le nom du pays. Une version plus récente date du XVIIe siècle, quand les rois de France, Louis XIII et Louis XIV, avaient pris à leur service des hommes armés de la cavalerie slave. Ces soldats portaient un tissu noir sur leur col de chemise. On les appelait les Royal-Cravates et de ce nom propre est né le mot cravate, déformation de croate.

Longtemps enclavé, le territoire présentait trois grands foyers de peuplement : bergers dans les Alpes dinariques, paysans dans les campagnes, pêcheurs sur les bords de l’Adriatique. Une répartition géographique que l’on retrouve en condensé en Istrie, qui explique que certains milieux naturels soient encore aujourd’hui presque vides (montagnes, forêts, îles désertes) alors que les sols fertiles de la Croatie continentale, le climat doux du littoral et les villes (60 %) concentrent les plus forts taux de population.

Après la Seconde Guerre mondiale, les progrès de l’industrialisation et le développement du tourisme accélèrent la désertification des campagnes. Dans les régions d’altitude, on ne compte guère plus de 20 ou 23 habitants au kilomètre carré, pour une densité globale de 72,5 habitants au kilomètre carré. Un Croate sur quatre habite l'une des quatre principales villes croates (Zagreb, Split, Rijeka et Osijek). Au dernier recensement 2021, le comté d’Istrie, sur une densité de 70 hab./km2, comptait principalement une majorité de Croates (142 152), des Istriotes (10 025), c'est-à-dire des personnes qui parlent un dialecte roman comparable au vénitien, des Italiens (9 784), des Serbes (5 778), des Bosniaques (4 838), des Albanais (2 055) et des Slovènes (1 000).

Les combats de la dernière guerre en Croatie (1991-1995) ont épargné l’Istrie, qui n’a connu ni les bombardements ni l’exil de sa population, mais les Istriens ont participé à l’effort de guerre sur les plans militaires, économiques ou caritatifs. La péninsule était une terre de repli pour les civils, qui fuyaient les combats. Un grand nombre de réfugiés et d'expulsés furent accueillis dans des hôtels ou des complexes hôteliers du littoral. Nombre de ces réfugiés sont restés vivre en Istrie. La distribution spatiale de la population en fut bousculée.

La question de la diversité

Le préambule de la Constitution croate (22 décembre 1990) souligne d’emblée l’importance du respect de la diversité dans la population : « La République de Croatie se constitue en État national du peuple croate qui est aussi l’État de ceux qui, tout en appartenant à d’autres nations et à des minorités, sont ses citoyens : les Serbes, les Musulmans, les Slovènes, les Tchèques, les Slovaques, les Italiens, les Hongrois, les Juifs et autres, auxquels sont garantis l’égalité avec les citoyens de nationalité croate ainsi que le respect de leurs droits nationaux en conformité avec les règles démocratiques de l’ONU et des autres pays du monde libre. » Ces minorités nationales bénéficient de la liberté d’enseigner dans leur langue, d’une autonomie culturelle, et sont représentées au Parlement de Zagreb ainsi que dans les collectivités territoriales. L’Istrie, plus que toute autre région croate, est très représentative de cette diversité et, à l’ère de la coopération Schengen, elle reste un espace de rencontres entre différents peuples et cultures.

Les Italiens, forte minorité nationale

La plus grande partie de la population est composée de Croates puis d’Italiens. Par-delà la carte postale qui décrit la région comme une belle Toscane croate, une longue histoire, parfois douloureuse, relie les habitants de la péninsule à l’Italie du Nord. La communauté italienne en Croatie et spécialement en Istrie fut réprimée sous le régime titiste et sous la gouvernance nationaliste de Franjo Tudjman. Malgré cela, plus de 30 000 Italiens vivent aujourd’hui sur l’ensemble du territoire et près de la moitié en Istrie. Ils ont un poids politique, culturel et culinaire ! En Istrie, les anciens pratiquent presque tous le bilinguisme, ce que les régionalistes istriens voudraient bien instituer à nouveau à l’école. Les panneaux de la route sont en deux langues, les cuisines régionales se ressemblent.

Après le croate et l'italien, les langues les plus représentées en Istrie sont le slovène, l'albanais, le serbe et le bosniaque. Bien plus clairsemée, la communauté istro-roumaine, en constante diminution, est assimilée aux Italiens d’Istrie et possède son propre dialecte. En 2021, il resterait environ un millier de ressortissants de cette petite minorité. Ils étaient 25 203 Istriotes en 2011. Récemment, des actions citoyennes tentent de sauvegarder leur identité (promotion de la langue, de la littérature, du folklore).

La démographie nationale en berne

Depuis trois décennies, la population croate est en lente diminution et l’Istrie n’y échappe pas. Elle est passée de 4,773 millions d’habitants (1990) à 4 millions à peine en 2021. Ce bouleversement démographique est lié à la hausse de la mortalité lors de la dernière guerre, mais aussi à l’émigration. La maîtrise de la démographie reste une priorité pour le gouvernement et pour l’avenir du pays. Malgré l’entrée du pays dans l’Union européenne, nombre de jeunes et diplômés préfèrent s’installer à l’étranger. Des milliers de Croates y ont trouvé de meilleures conditions de travail et des salaires plus élevés. Selon les estimations, la diaspora compterait plus de 2,5 millions d’émigrés, qui vivent aux États-Unis, au Canada, en Amérique du Sud, en Australie, en Nouvelle-Zélande, et bien sûr en Europe, en Allemagne, en Autriche, en Suisse, en Italie, en France ou en Suède.

Source in Bureau des statistiques croates : www.dzs.hr