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De Brocéliande au golfe du Morbihan

La forêt de Brocéliande est connue pour abriter la légende arthurienne. Mais vous ne la trouverez pas sur la carte, puisque son nom n’est pas reconnu administrativement. C’est dans la forêt de Paimpont qu’il vous faudra chercher la trace des chevaliers de la table ronde et de Merlin l’enchanteur, dont on peut apercevoir le tombeau ! Connaissez-vous l’importance des fées sur ce territoire légendaire ? Elle n’est pas des moindres, et c’est d’ailleurs son amour pour la fée Viviane qui aurait fait périr Merlin ! Quant aux chevaliers, ils avaient intérêt à se méfier de la fée Morgane… Celle-ci, terriblement déçue par le chevalier Guyomard, aurait créé un piège pour enfermer tous les amants infidèles en amour, avec l’aide de Merlin. Ce fut la naissance du Val sans retour, ou encore du Val périlleux ou Val des faux amants, où elle réussit à emprisonner des chevaliers dix-sept années durant… Jusqu’à ce que Lancelot du Lac ne déjoue son sortilège et parvienne à libérer 253 chevaliers ! Quant à Guyomard, il est toujours sur les lieux, puni et pétrifié avec sa maîtresse pour l’éternité !

Les pauvres fées, amoureuses de leur belle forêt de Brocéliande, auraient fini par s’en faire chasser par les korrigans, ces petites créatures similaires à des lutins, parfois bienveillantes, parfois malveillantes, omniprésentes dans les récits bretons. Les fées, alors esseulées sur une terre vallonnée, à l’actuelle localisation du golfe du Morbihan, versèrent un flot de larmes qui se transforma bientôt en torrent, tant leur désarroi était intense. De dépit, elles jetèrent leurs couronnes de fleurs… Si leurs larmes devinrent les eaux du golfe, on raconte que leurs couronnes et les pétales qui s’en détachèrent formèrent ses îles. La plus belle couronne, celle de la reine des fées, dériva au large et forma Belle-Île-en-Mer. Elles auraient ainsi contribué à la création d’autant d’îles que l’on compte de jours dans une année… Pourtant, sur ces 365 îles, les voyageurs ne semblent en compter aujourd’hui qu’une quarantaine…

Mais l’histoire du golfe du Morbihan est loin de s’arrêter là ! Parmi les légendes que l’on y raconte, il y a celle de la séparation entre l’Île-aux-Moines, alors appelée Izenah et peuplée de marins, et l’Île d’Arz, un territoire de pêcheurs. Alors que ces deux îles étaient reliées par un isthme, un jeune homme d’Izenah aimait d’un amour pur une jeune fille d’Arz. Ses parents découvrir bientôt cette relation qu’ils désapprouvèrent violemment ! Déçus de leur fils, ils l’enfermèrent chez les moines. Mais chaque jour, la jeune fille, éprise et courageuse, traversait l’isthme pour chanter au pied du monastère. Les moines, lassés par ces sérénades incessantes, chargèrent les korrigans de submerger l’isthme, provoquant de ce seul geste la noyade de cette amoureuse fidèle et la séparation des deux îles à jamais !

Les mystères des mégalithes

C’est un incontournable lors d’un séjour dans le Morbihan : aller voir les alignements de menhirs de Carnac. Cet ensemble mégalithique, le plus grand au monde, est aujourd’hui classé comme monument historique, et daté de l’époque du Néolithique. Ce sont des centaines de menhirs qui se dressent, parfaitement alignés, sur plus de quatre kilomètres, du plus imposant au plus petit ! Entre l’origine de ces pierres de granit et leur disposition étrange, le mystère reste immense. Quoi qu’il en soit, on suppose que ces alignements furent de véritables lieux de vie, et qu’on jouait entre les menhirs, qu’on s’y mariait, qu’on y construisait des maisons dans leur alignement… On raconte même que les femmes se frottaient à ces pierres pour stimuler leur fertilité ! En outre, les mégalithes sont souvent liés à des sépultures, en particulier les plus imposants comme les tumulus, les dolmens ou les cairns.

Mais nous ne pouvons passer outre la légende de saint Cornély, l’un des premiers papes, entre les années 251 et 253 de notre ère. Ayant quitté Rome suite aux persécutions de l’empereur, il cheminait à travers la Gaule accompagné de deux bœufs portant ses bagages. Quand soudainement ce saint homme se serait fait attaquer par les innombrables soldats de l’armée romaine. Pour leur échapper, il se serait caché dans l’oreille de l’un de ses bœufs, et de là, il aurait transformé ses assaillants bien alignés… en menhirs !

De nombreux autres sites du Morbihan portent la trace de ce passé néolithique qui nous fascine tant. Parmi ceux-ci, l’île de Gavrinis, au cœur du golfe du Morbihan, est très surprenante, et plus particulièrement son monticule de pierre (ou cairns). Celui-ci est creusé d’un couloir de dolmens qui mène à une chambre funéraire. Cette tombe fut découverte en 1832, et sa grande particularité réside dans les dessins qui sont sculptés sur ses murs de granit, d’une rare complexité et régularité. Ces gravures sont classées monument historique depuis 1901, et leur beauté a de quoi impressionner autant qu’interroger ! Si certains identifient des motifs comme des outils ou des serpents, elles continuent de garder leur secret avec détermination… Quant à la façon dont ces dalles de plusieurs tonnes ont été acheminées sur l’île il y a des millénaires, les suppositions restent bien vagues… Peut-être une visite vous permettra de ressentir l’histoire cachée de ce lieu ?

Des lacs aux eaux troubles…

L’intérieur du département est aussi riche en histoires mystérieuses que ses côtes et ses îles ! Et comme souvent dans l’univers des légendes, certaines ont plus le don de faire hérisser nos poils que de nous rendre tendrement rêveurs ! Au lac de Guerlédan, vous serez servi en frissons… Plus grand lac artificiel de Bretagne, créé il y a moins d’un siècle, il délimite la frontière entre le Morbihan et les Côtes-d’Armor, et son barrage alimente une usine électrique. Mais en Bretagne, peu importe qu’un élément du paysage soit relativement récent, il devient vite le lieu de récits trépidants. Il semblerait que certains promeneurs entendent des cloches sonner, qui viendraient d’un clocher englouti au fond du lac. Les pauvres bougres… Ce ne serait autre que l’Ankoù, la redoutable personnification bretonne de la mort, annonçant sa venue prochaine… Peut-être cela pourra-t-il vous rassurer : ce lac est mis à sec de temps à autre, et la dernière fois, en 2015, nous avons pu vérifier, il n’y a nulle trace de ce clocher !

À quelques pas de là, c’est le sanguinaire comte Conomor qui a laissé son empreinte terrifiante. Effrayé par une prophétie racontant qu’il finirait assassiné par son propre enfant, il avait déjà tué une à une quatre épouses tombées enceintes… Jusqu’à ce qu’il ne rencontre Tréphine, la fille du comte Waroc’h, si belle et vertueuse. Il demanda sa main, et le mariage fut conclu après que Tréphine eut cherché conseil auprès de saint Gildas, qui eut foi en la conversion de Conomor grâce à Tréphine. Mais dès lors qu’elle tomba enceinte elle aussi, Conomor l’enferma à double tour dans une pièce barricadée, dont elle parvint à s’enfuir en brisant les barreaux miraculeusement. Mais Conomor la retrouva bientôt, et la décapita sans plus hésiter. Saint Gildas découvrit alors le corps de Tréphine, et après de longues prières, il reposa sa tête sur son corps, et la ressuscita ! Elle donna le jour à son fils Trémeur, et vécut cachée dans le village qui porte aujourd’hui son nom : Sainte-Tréphine. Trémeur, quant à lui, périt de la main de son père en pleine bataille, sans que ce dernier ne connaisse son identité.

Il est une autre étendue d’eau qui stimule l’imaginaire : c’est l’étang du Duc, près de Vannes. On y apercevrait, de temps à autre, une magnifique Mary-Morgane (une sirène) aux cheveux verts, profitant du soleil estival. Un soldat, subjugué par sa beauté, se serait approché d’elle. Mais celle-ci l’aurait entraîné sous les eaux dans une longue étreinte dont il ne serait jamais revenu. À l’origine, on raconte que cette sirène était une princesse, propriétaire de l’étang du Duc, que le seigneur voisin, de l’étang de Plaisance, voulait épouser. Ne pouvant s’y résoudre, elle lui avait annoncé que ce jour n’arriverait pas tant que l’étang de Plaisance ne coulerait pas dans celui du Duc, ce que le seigneur accomplit en creusant un canal entre les deux lacs ! Alors qu’il l’intimait de le rejoindre, la princesse, de dépit, se jeta dans le lac pour ne plus en ressortir…

Saint-Cado, derrière la carte postale…

Vous avez sûrement entendu le nom de Saint-Cado, île connue de la Ria d’Étel pour sa jolie petite maison aux volets bleus, perchée sur son îlot voisin. Mais saint Cado est aussi l’un des saints les plus populaires de Bretagne, représenté dans un vitrail de la chapelle qui porte son nom. Vivant sur l’île, il aurait fait construire le pont qui la relie au continent pour attirer les fidèles à lui. Mais le diable serait intervenu dans ce projet de construction, en offrant son aide à saint Cado. Celui-ci, acceptant la proposition, fit face à un horrible pacte : il devait offrir au diable le premier être vivant qui passerait sur le pont. Heureusement, il parvint à berner l’être maléfique en y faisant passer un chat !

Un fantôme plutôt apprécié

Elles seront nombreuses, les créatures et les histoires qui vous accompagneront lors de votre séjour dans le Morbihan… Si l’on ne peut rassembler ici des siècles de tradition orale, il est un personnage que l’on saluera avant de clore ce dossier. Il s’agit d’un gentil… fantôme ! Et c’est au sud de la « Petite Mer » que nous le retrouvons, entre les murs du somptueux château de Suscinio, résidence des ducs de Bretagne, sur la presqu’île de Rhuys. Il s’agirait d’un petit garçon de 6 ou 7 ans, le jeune fils d’un ancien capitaine de la garde. Mais ce petit fantôme n’aurait jamais fini de s’amuser, et son jeu préféré resterait les parties de cache-cache. Plus taquin qu’effrayant, on l’entendrait courir surtout dans les combles, ancienne chambre des enfants, et dans la garde-robe du duc ! Le rencontrerez-vous ?