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Des références historiques : Prévert, Hugo, Tocqueville, Barbey d’Aurevilly

Ce n’est qu’au tout début des années 1970 que Jacques Prévert vient s’installer dans la Hague. Jusque-là, il passait la plupart de son temps entre la capitale et Antibes. Sur les conseils de son ami décorateur Alexandre Trauner, il achète une maison dans le petit village d’Omonville-la-Petite, qu’il aime instantanément. Il y poursuit ses travaux d’écriture, trouvant dans la Hague le cadre propice à sa créativité, mais aussi de collage, jusqu'à sa mort en 1977. Enterré dans le petit cimetière du village, sa maison est le cadre d’une jolie visite. Un peu plus loin, un jardin, qui porte le nom de l’artiste, mêle essences rares et locales dans un somptueux décor.
Victor Hugo visite la Manche du sud au nord pendant l’été 1836, et en retire des impressions contrastées : il est émerveillé par le Mont-Saint-Michel, un peu moins par Avranches et par Cherbourg, qu’il découvre de nuit, à une époque où l’éclairage public n’existe pas. De ce voyage lui viendront plusieurs poèmes : L’Été à Coutances, À Granville en 1836 ou Près d’Avranches. De son passage à Barneville, il retiendra la figure des paysannes locales, qui lui inspirèrent le personnage de Toussaint dans Les Misérables. Au cours de cette époque, il ne savait bien évidemment pas qu’il allait devoir vivre en exil à quelques kilomètres de la Manche, à Jersey puis Guernesey, seize ans plus tard. Décidée à la suite de la publication de son pamphlet Napoléon le Petit, sa vie sur les îles anglo-normandes sera parmi les périodes les plus prolifiques de l’auteur. La mémoire d’Hugo reste aujourd’hui vive dans le département, tant et si bien que le conseil départemental propose ainsi de suivre les traces du poète via une application dédiée.
Si beaucoup célèbrent ici l’homme politique Alexis de Tocqueville (il a été député de la Manche au XIXe siècle, Président du Conseil Général et l’un des artisans de la ligne ferroviaire Paris – Cherbourg), d’autres oublient que celui-ci a également été un auteur prolifique sur des sujets relatifs au fonctionnement de l’État : Lettres choisies et souvenirs, L’Ancien Régime et la Révolution ou encore les Mémoires sur le paupérisme.
Barbey d’Aurevilly, de son côté, est né à Saint-Sauveur-le-Vicomte en 1808 et meurt à Paris en 1889. Il est l’auteur d’une œuvre particulièrement prolixe, et touchant à de nombreux domaines : romancier, journaliste et critique littéraire, il écrit également de multiples poèmes. Tranchant, Barbey d’Aurevilly éveille des sentiments ambivalents : Flaubert et Hugo (qui ne tient pas compte de sa proximité géographique !) s’en moquent ouvertement, d’autres portent son talent aux nues.

L’époque contemporaine

De nombreux auteurs contemporains forment également une vaste trame culturelle. Ils sont connus localement, mais rarement au-delà : les auteurs locaux sont nombreux, et permettent à la littérature ici de disposer d’une très vaste offre en la matière : ainsi les romans et essais de Michel Besnier, les écrits si justes du prix Goncourt originaire d’ici Didier Decoin, les livres de Dominique Gros ou Michel Giard : la liste est longue. Si elle n’est pas originaire d’ici, l’auteure Muriel Barbery, dont le livre L’Élégance du hérisson a connu un succès mondial dans les années 2000, a enseigné plusieurs années à Saint-Lô. Plus proche encore, l’immense succès des Déferlantes de Claudie Gallay a pour cadre la Hague. Enfin, Gilles Perrault, l’auteur du Pull-over rouge, vit de son côté à Sainte-Marie-du-Mont, et ne manque jamais une occasion de parler du coin. Aujourd’hui, la richesse de la production littéraire dans la Manche se distingue selon deux types d’ouvrages : ceux qui évoquent le passé des lieux, et les romans, qui prennent pour cadres différents endroits du département. Pour trouver ces livres – au-delà de la facilité d’internet – il vous faudra vous rendre dans l’une des très nombreuses librairies locales. Ainsi, la majeure partie d’entre elles comptent quelques ouvrages d’auteurs locaux : vous trouverez la liste de ces lieux dans le guide. Notez enfin qu’il n’existe pas à proprement parler de style local : la prose est propre à chaque auteur, qui définira les lieux, les ambiances et les atmosphères selon ses propres envies.

Les inclassables

Ils ne sont pas connus au-delà de la Manche ou, bien qu’originaires d’ici, leurs écrits ne sont pas inspirés par le département. Dans la première catégorie, on trouvera par exemple Cotis-Capel. Homme aux nombreuses activités, celui-ci était prêtre, mais aussi marin-pêcheur. Mort en 1986, il laisse derrière une œuvre poétique en langue locale, regroupées dans plusieurs recueils : Rôcales, Raz-Bannes ou Les Cotis qui évoquent la vie d’ici. Plusieurs rues et bâtiments portent son nom dans le département. Dans un autre registre, Roland Barthes, philosophe et sémiologue né à Cherbourg, connaîtra la notoriété dans les dernières années de sa vie, avec la publication de Fragments d’un discours amoureux en 1977. Le livre, largement basé sur l’expérience de l’auteur, reste une référence pour de nombreux étudiants. Dans cette catégorie, nous classerons également le talentueux et regretté Jean Teulé, né à Saint-Lô, disparu en octobre 2022, et qui, outre de nombreux romans, a créé de nombreuses bandes dessinées bien connues des amateurs.

Des événements nombreux…

Les possibilités de rencontrer les auteurs, ou d’assister à des conférences sur ces thématiques, sont nombreuses. Pêle-mêle, existent ici les salons du livre de Valognes ou de Torigni-les-Villes, le festival du livre de jeunesse et de la bande dessinée de Cherbourg, l’évènement astucieusement intitulé « Ancres et encres » à Saint-Vaast-la-Hougue : la liste est longue.

… et des prix qui le sont tout autant

La tradition des distinctions et remises de prix pour des œuvres littéraires est vive. Parmi les plus célèbres, on notera le prix Alexis-de-Tocqueville, qui récompense une personne attachée à la défense des libertés publiques, mais aussi le prix littéraire du Cotentin, dont l’objectif est de mettre en avant des auteurs locaux, ou ayant mis en évidence le territoire de la presqu’île. On notera également le prix Jean-Follain, décerné tous les deux ans à une prose poétique, et à son auteur, à Saint-Lô. Évidemment, la liste n’est pas exhaustive !