Pour tout voyageur, le Grand Sud est synonyme d'ailleurs. Mais pour tout un chacun, c'est aussi le lieu d'un troublant mystère. Des dunes de sable fin, objet de tant de fantasmes, à la rudesse des monts rocailleux, sauvages à l'image du peuple qui les habite ; des étendues virginales des lacs asséchés regorgeant de mirages surprenants aux roches ocre illuminant des vallées entières au lever du jour, le désert déploie ses multiples facettes sans jamais se dévoiler pour autant. A l'instar de la mer, le désert fascine et inquiète à la fois ; seigneur omnipotent en son domaine, il semble nous marquer de son empreinte dès lors que l'on y pose le pied. On est subjugué par la puissance naturelle de cet élément dont les dimensions, les conditions extrêmes de vie et de température sont si éloignées de nos repères habituels. Le Grand Sud tunisien, c'est le désert dans toute sa splendeur, avec toutes ces caractéristiques et même plus. Le Grand Sud tunisien est riche de contrastes, de charme, d'immensité, de décors et d'atmosphères inoubliables. Le désert recèle bien des mystères, c'est le lieu des plus grands secrets de l'humanité, de ses mythes et de ses mythologies.

Mais le désert a de quoi surprendre à tout instant, aussi il faut y faire preuve de prudence et de vigilance.

Les matmata.D'origine berbère, les matmata sont ces habitations troglodytiques que l'on voit souvent creusées à flanc de montagne.

Matmata, mot qui désigne aussi un ensemble de plusieurs villages, est le nom des tribus qui s'étaient réfugiées dans cette région. Certaines d'entre elles avaient construit leurs habitations à flanc de montagne, d'autres avaient creusé des souterrains. Ces villages invisibles, cratères béants où se dissimulent les habitations, forment un véritable paysage lunaire. Le principe de ces maisons troglodytiques fut adopté à Bulla Regia, à l'époque romaine (maisons à étage souterrain construites par les notables numides romanisés). Chaque cratère est en fait une maison. Un tunnel permet d'accéder à une sorte de puits, véritable entonnoir circulaire autour duquel sont excavées les pièces d'habitation et d'engrangement. Le long de l'entrée sont creusées étables et remises à outils. On arrive ensuite à la cour ronde. Dans les parois argileuses du patio sont creusées des niches, les chambres de la famille ou les greniers et les salles communes. Pour accéder à la plupart de ces pièces, il fallait être en bonne forme physique, puisqu'on y montait à l'aide d'une corde. Les greniers étaient remplis par le haut où, par d'étroits conduits, on faisait couler les céréales. Le mobilier était généralement fixe (lit et étagères), formé d'un châssis de bois recouvert d'argile ou de plâtre, blanchi à la chaux. Ces habitations sont remarquablement climatisées. Il peut faire une chaleur insupportable à l'extérieur, mais dans les matmata, la fraîcheur règne. Situées à 400 m d'altitude, elles ne sont qu'à 40 km de la mer. On dit que leurs habitants vivent longtemps et en bonne santé... Pour les découvrir, il n'est pas nécessaire d'organiser une grande expédition. Allez à Beni Aïssa, à Chembali, à Techine, à Hedege et, bien sûr, à Matmata, la ville la plus connue.

Les villages de crête. Le Grand Sud tunisien est habité par les sédentaires de la montagne et les nomades de la plaine. De loin, on ne voit que du relief, une uniformité ocre, mordorée. En s'approchant de plus près, on remarque des constructions fondues dans leur toile de fond, ton sur ton, et il ne reste plus qu'à y voir de plus près. Ces habitations ont des portes en bois de palmier, souvent ornées de symboles berbères et encadrées de motifs de plâtre ou peintes en ocre rouge (avec des dessins analogues à ceux des tatouages et des poteries). Une petite mosquée, généralement blanche, aide le visiteur à trouver le tracé de la piste. Chenini, Douiret, Ghomrassen, Guermassa n'attendent qu'une visite. Imposant, grandiose, tout y est à la hauteur de la fierté des Berbères. Des pointillés de couleurs vives animent le paysage : les femmes s'habillent ici de rose fuchsia, de rouge et de noir. Un peu plus loin se trouvent les ksour.

Les ksour. Ce sont les châteaux du désert, des constructions étranges, quelque peu mystérieuses. Le ksar, ou gasr, est une sorte de quadrilatère formé par un ensemble d'alvéoles, superposées ou non (les ghorfas). Les habitants y stockaient leur récolte, au temps de l'insécurité, à l'abri des razzias. Le ksar sert pour le commerce, mais ne sera jamais une habitation. Il est également lieu de festivités, d'enseignement, bref de réunions sociales et religieuses. Le site est toujours remarquable : il faut qu'il soit particulièrement difficile d'accès aux étrangers à la communauté. Dispersés dans la campagne, des observatoires permettent le contrôle des alentours. Perchés au sommet des pitons, ces greniers collectifs appartiennent au mode de vie semi-nomade. Leur longévité s'explique par leur fonction de refuge en période d'insécurité. Un détour s'impose par Ouled Soltane, Ksar Khérafcha, Ksar Hallouf, sans oublier Ksar Hadadda et tous les autres.

Et le désert fut ! Le sable et sa finesse, sa douceur, sa légèreté, sa chaleur, son opiniâtreté... La courbe des dunes se répète à l'infini, ni toujours la même ni jamais vraiment différente. On y marche à pas feutrés, dans un éphémère devenu éternité. Quand la chaleur accablante du jour rencontre un bref instant la fraîcheur de la nuit qui s'annonce, on peut encore croiser des nomades, des vrais, avec leurs dromadaires et leurs demeures de toile. Les femmes, ici, ont aussi leur artisanat. Elles n'ont pas leur pareil pour inventer aux tissus des teintes nouvelles. Le métier à tisser dans ces régions est un métier de basse lisse horizontal. Les mains tatouées des femmes créent de grands sacs à graines ainsi que les filij, ces bandes longues et unies qui, une fois cousues entre elles, forment la tente bédouine. Chaque tribu a ses propres motifs qui permettent d'identifier la caravane. Passer ne serait-ce qu'une nuit à la belle étoile, écouter le silence, admirer un ciel incroyablement dégagé est un enchantement ; on croirait baigner parmi les étoiles...

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Photos et images du Grand Sud

Ghorfas de Ksar Haddada. Alamer - Iconotec
Porte de Tozeur. Author's Image
Traversée des salines dans la région du Chott el Djérid. Author's Image
Le village troglodyte de Chenini. Delpixel - Shutterstock.com
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